DOSSIER – Réhabiliter les sites et les sols radiocontaminés
octobre 2025
En France, des dizaines de sites présentent des niveaux de radioactivité significativement supérieurs à celui de la radioactivité naturelle ambiante. Des spécialistes interviennent en amont, pour « lever le doute » et déterminer si cette contamination présente un risque sanitaire ou environnemental. Et en aval, pour garantir que l’assainissement effectué est bien conforme aux objectifs définis par les pouvoirs publics. Une expertise qui permettra au site de remplir sans danger son nouvel usage, qu’il soit industriel, agricole, d’habitation, ou d’être rendu à la nature.

Parce qu’elle a historiquement accompagné le développement d’activités nucléaires sur son sol, la France recèle sur son territoire des dizaines de sites présentant une radioactivité supérieure au bruit de fond naturel environnant. Anciens laboratoires de recherche, ateliers ayant manipulé du radium au 20e siècle, vieux réacteurs nucléaires en démantèlement ou simples lieux d’entreposage de matières radioactives, tous ces sites ne présentent pas forcément des risques sanitaires. Encore faut-il s’en assurer, par des contrôles rigoureux. Et dépolluer sans tarder ceux qui révèlent des niveaux de radioactivité les plus importants, en particulier les sites historiques situés en agglomération, à proximité d’habitations, d’écoles ou de crèches. Car le sujet est sensible pour les riverains, qui s’inquiètent à la fois pour leur santé et la valeur de leurs biens immobiliers.
Lorsque le site est sous la responsabilité d’un industriel, il lui incombe de rendre cette radioactivité d’origine humaine à des niveaux compatibles avec les usages envisagés. Pour les autres sites dits « orphelins », sans propriétaire ou responsable connu, c’est à l’État de prendre en charge la dépollution, via la Commission nationale des aides dans le domaine radioactif (CNAR). Dans tous les cas, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASNR) peut apporter son appui pour expertiser l’assainissement et certifier que les contrôles effectués garantissent bien l’absence de risque à la fois pour les populations et les écosystèmes.
ÉDITO - Mobiliser des moyens proportionnés aux enjeux
Comme beaucoup d’industries, celles qui utilisent des substances radioactives laissent, lorsque leur activité a cessé, des sites à assainir selon des procédures bien définies. Cela concerne les installations nucléaires, mais aussi des sites historiques orphelins pollués principalement au radium. Ces chantiers d’assainissement sont complexes. Ils font appel à des connaissances techniques et scientifiques pointues : caractérisation radiologique in situ, métrologie, traitements géostatistiques des données, étude des transferts des radionucléides dans l’environnement, de l’efficacité des procédés lors de pollutions mixtes - chimiques et radiologiques... La qualité du diagnostic initial est un élément clé de la réussite du projet. Économiser sur ce diagnostic complexifie a posteriori les opérations, occasionnant des surcoûts.
La doctrine initiale, exigeant la remise du site à son état initial « quoi qu’il en coûte », a montré des limites pour les sites orphelins pollués au radium. Le scénario de référence reste un assainissement complet permettant de libérer le site sans restriction d’usage. Mais le gestionnaire du site peut proposer, en cas de difficultés, des scénarios adaptés compatibles avec les futurs usages du site. L’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR1) évalue leurs impacts pour proposer, le cas échéant, des servitudes. Il est alors indispensable de garder l’historique du site et des actions entreprises, ainsi que des éventuelles restrictions d’usage qui en découlent.
A Brennilis, l’énigme résolue d’une contamination « fantôme »
En 2008, une lentille de contamination radioactive, ne pouvant être assainie, est identifiée par EDF sous la centrale de Brennilis en cours de démantèlement. À l’issue des travaux menés par l’exploitant, le contrôle de l’IRSN vise notamment à confirmer qu’elle n’a pas migré. Pourquoi les mesures ne permettent-elles pas de reconstituer les simulations initiales faites par EDF? D’où provient cette contamination ? L’énigme est levée en 2022.

Une doctrine qui évolue
L’objectif poursuivi lors de l’assainissement d’un site pollué dépend de multiples facteurs. Des usages prévus du site, de la faisabilité technique de l’assainissement, des coûts et l’impact des pollutions résiduelles des différents scénarios envisagés.

Infographie - Dépollution d’un pavillon radiocontaminé dans l’Yonne
Des objets radioactifs oubliés sont découverts de manière fortuite sous le jardin d’un pavillon de Champlay, dans l’Yonne, en 2012. Plusieurs acteurs publics interviennent, de façon coordonnée, pour assainir le lieu. Au final, le site est totalement dépollué.

Reportage - Entre froid glacial et parquet effondré, le contrôle de décontamination à risques d’un ancien site horloger à Charquemont
En novembre 2021, les experts en radioprotection viennent pour deux semaines contrôler l’assainissement radiologique des 4 600 m² d’un ancien site horloger à Charquemont, dans le Doubs. Un chantier hors-norme, tant par son ampleur et sa durée que par les conditions éprouvantes de travail.