Labos 1.5 : dix équipes engagées pour réduire leur empreinte carbone
Missions de terrain, conférences, dispositifs expérimentaux, simulations numériques… les impacts des activités de recherche et d’expertise sur le climat sont mal caractérisés. Dix équipes de l’IRSN – en épidémiologie, dosimétrie et accidents graves – s’engagent dans la démarche Labos 1.5. Elle vise à établir le bilan des émissions de gaz à effet de serre (GES) à l’échelle d’une unité, à identifier et à mettre en œuvre des actions pour les réduire.
Lancées par des chercheurs et des experts, ces actions sont soutenues par l’IRSN et s’inscrivent dans l’engagement RSE (responsabilité sociétale des entreprises) de l’Institut.
Labos 1.5 est un collectif national créé en 2019 par des membres du monde académique.
Il accompagne 778 laboratoires dans la réalisation de leur bilan carbone et fédère par son réseau Laboratoires en transition plusieurs centaines de scientifiques. Leur objectif ? Faire baisser, d’ici à 2030, de 20 % à 55 % leur empreinte carbone par rapport à 2019. La démarche contribue à une réflexion globale sur l’empreinte carbone de la recherche en France. Elle est notamment portée par le ministère de la Recherche, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), l’Institut national de la recherche agronomique (Inrae) et à laquelle l’IRSN souhaite s’associer.
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Étude en Manche : les émissions de tritium depuis la mer vers l’atmosphère mieux évaluées
Environ 1% du tritium rejeté en mer par l’usine de La Hague1 se retrouve dans l’atmosphère à l’échelle de la Manche, montrent les recherches du Laboratoire de radioécologie de Cherbourg-Octeville (LRC, Manche)2.
Des élévations d’activités de tritium dans l’air sont montrées lors d’expérimentations, entre 2017 et 2021. Dans la région de La Hague, du golfe normand-breton et de la baie de Seine, les valeurs moyennes annuelles dues à ce transfert sont de 130 TBq3. Certaines conditions de vent et de marée transportent ce radionucléide vers les écosystèmes terrestres.
Mieux évaluer les flux entre l’eau et l’air améliore les études d’impact sur la population, en prenant en compte les émissions des rejets chroniques ou accidentels en rivière, fleuve, mer, transportés à terre. L’approche du LRC – couplant modèle hydrodynamique, d’évaporation et de transport atmosphérique – est applicable à d’autres radionucléides.
1. L’exploitant contrôle les rejets soumis à autorisation.
2.Connan O et al. (2023), J. Environ Radioact. https://doi.org/10.1016/j.jenvrad.2022.107068.
3.Cela équivaut à 260 à 1300 panneaux luminescents de sécurité « Sortie » au tritium
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Côtes méditerranéennes : connaître les zones impactées en cas de rejets accidentels dans le Rhône
Comment se disperse le césium 137 en mer Méditerranée lorsqu’il est rejeté par une centrale nucléaire située le long du Rhône ? Les scientifiques du Laboratoire de recherche sur les transferts des radionucléides au sein des systèmes aquatiques (LRTA), situé à Cadarache (Bouches-du-Rhône), viennent de finaliser la modélisation du transfert de cet isotope radioactif dans l’environnement, avec la thèse d’Adrien Delaval, doctorant spécialisé en environnement.
Comprendre le trajet et le devenir de ce radionucléide en cas de rejets accidentels permettra de mieux connaître les zones les plus impactées le long des côtes. Les pouvoirs publics pourront aussi anticiper des actions de protection de l’homme et de l’environnement, comme une limitation des zones de pêche. Verrous scientifiques Les travaux scientifiques couplent deux modèles indépendants de l’IRSN – Casteaur1 pour la partie fluviale et Sterne2 pour le marin – en créant le chaînon manquant entre les deux. Deux verrous scientifiques sont levés.
La première amélioration caractérise des conditions de vent et de débit que l’on retrouve le plus régulièrement à l’embouchure du Rhône. La seconde quantifie le césium 137 pouvant se désorber3 des particules du fleuve au contact de l’eau de mer. La thèse s’appuie sur trente-deux travaux scientifiques antérieurs, dont certains de l’IRSN.
1. Calcul simplifié des transferts dans les cours d’eau récepteurs www.irsn.fr/code-casteaur
2. Simulation du transport et du transfert d’éléments radioactifs en environnement marin www.irsn.fr/outil-expertise-contamination-marin
3. Phénomène inverse de l’adsorption : les ions et les molécules se détachent du support
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Zones radio-contaminées : quels effets à long terme sur la biodiversité ?
Quel est l’état de la faune des territoires radio-contaminés de la préfecture nippone de Fukushima ? Grâce à une mission mise en œuvre en 2022, la rainette, une grenouille arboricole, livre des éléments de réponse. La mission est menée par l’IRSN – Laboratoire de recherche sur les effets des radionucléides sur les écosystèmes de Cadarache (Bouches-du-Rhône) – et les universités de Fukushima (Japon)1 et d’Aix-Marseille2. En 2013, une première étude sur les rainettes dans cette préfecture nippone met en évidence une augmentation des dommages de l’ADN mitochondrial et une altération de leur chant. Un travail3 sur la même grenouille trente ans après l’accident de Tchernobyl montre un fort taux de mutations et un faible nombre d’individus dans la zone d’exclusion. Leurs processus physiologiques majeurs liés au métabolisme énergétique apparaissent aussi altérés. L’étude en cours vérifie la présence de telles évolutions à Fukushima et examine l’état physiologique des rainettes onze ans après l’accident. Elle vise une meilleure évaluation des risques écologiques.
1. Institute of Environmental Radioactivity.
2. Unité mixte Aix-Marseille Université/Inrae.
3. Car C. et al. (juillet 2021) Evolutionary Applications, 203.
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Quel est le bruit de fond des radionucléides artificiels ?
Quelles sont aujourd’hui les concentrations dans l’environnement des radionucléides artificiels provenant des retombées de l’accident de Tchernobyl et des essais d’armes nucléaires entre 1950 et 1980 ? Quelle exposition de la population en résulte ? En avril 2022, l’Institut publie le rapport « Bruit de fond » qui répond à ces questions et permet de disposer d’un état radiologique de référence. Cet état pourrait en particulier être utile en cas d’accident nucléaire. La connaissance du bruit de fond aide à déterminer les quantités de radionucléides ajoutées localement par les rejets des installations nucléaires. Ce document montre que le bruit de fond est très faible et diminue très lentement1. Il existe des zones2 où les concentrations de certains radionucléides sont plus élevées, en lien avec l’hétérogénéité des dépôts radioactifs initiaux. Sur ces espaces – qui regroupent près de 7 % de la population française –, la dose moyenne due au bruit de fond est estimée à 46 µSv/an, contre 9 µSv/an pour les personnes résidant ailleurs dans l’Hexagone. Pour mener cette étude, les scientifiques s’appuyent sur des milliers de résultats de mesures recueillis depuis les années 1960. Prélèvements d'algues à Grandcamp-Maisy (Calvados). © Jean-Baptiste Saunier/Médiathèque IRSN Afin de caractériser la situation actuelle, en complément de la surveillance annuelle, ils ont réalisé sept constats radiologiques régionaux. Menés en Val de Loire, vallée du Rhône, Méditerranée..., ces derniers sont basés sur des campagnes de prélèvements d’échantillons et de leurs analyses3.
1. Les concentrations sont le plus souvent inférieures à 1 Bq/kg dans les denrées et de l’ordre du µBq/m3 dans l’air.
2. Ces zones sont disséminées principalement dans l’est du pays: les Vosges, le Jura, la vallée du Rhône.
3. Pour le constat Normandie et Hauts-de-France par exemple, les scientifiques effectuent près de mille analyses.